Sacré Soirée !

Blouk avait enfilé la veste d’été chargée de ces objets usuels qu’il n’utilisait guère, comme les clés, le téléphone portable au cas où, la zapette pour le portail + les accessoires indispensables au « petit écrivain en campagne » et les cigarettes dont il ne saurait se passer. Bref, il était chargé comme une mûle qui va à la mer, ayant oublié maillot et parasol.

Difficile d’imaginer un appartement plus marin que celui de Charlotte ! Nous avions la mer en face de la baie vitrée, et dès que nous fûmes assis sur la terrasse, elle vint danser et chatouiller nos mentons. Ce qui nous gêna momentanément ce furent les cris d’enfants joyeux et les adultes qui étalaient des anatomies pas toujours remarquables…

Mais bast ! On parvint assez rapidement à faire abstraction de ces masses de chairs molles (et déjà bronzées, bon sang, comment font-ils ?) pour se concentrer sur l’assemblée des copains réunis autour de la table de la terrasse, écoutant attentivement l’oracle d’une animatrice en pleine forme.

Il s’agissait de dessiner un carré ou un rectangle imaginaire qui serait rempli d’un petit tiers de sable, d’un grand tiers de mer et d’une frange de ciel, et d’écrire nos impressions dans l’espace restant.

Chacun y parvint, réussissant même à caser les trois points de début et de fin. Nous passâmes ensuite aux choses sérieuses, écrire une histoire, une poésie, un texte personnel où le « je » serait sous-entendu ou non, et ce pendant une bonne heure.

Bien sûr la mer était là, à deux pas, se vidant peu à peu des chairs molles mais bronzées ci-dessus, mais la table du réfectoire improvisé était encore plus proche, et il y eut d’abord un grand ballet de copains se chargeant de provisions et remplissant leurs verres : écrire pendant une heure trente, c’était bien long, il ne s’agissait pas de perdre le moral.

A 20h30, chacun était prêt à lire son œuvrette, la suggestion de lire debout fut acceptée et c’est Mich qui s’y colla la première avec des haïkus dont le nombre de pieds, nous dit-elle, n’étaient pas réglementaires. Ensuite Charlotte nous dit son bonheur de vivre devant la mer et sa sérénité, la secrétaire délivra un texte sur « Mare Nostrum » dans lequel certains décelèrent un passé scolaire ; Mr n’alla pas au bout du carré car nous n’étions pas dans un bateau, et Faby uniquement à la fin de son rectangle. Puis ERGE nous régala d’une histoire de porion et de « gueules noires » du côté de Merlebach qui s’achevait dans un bateau au nom invraisemblable dans un port des Pays Bas, et nos rires le récompensèrent largement.

JIEME fut poétique comme lui seul sait l’être, Jtt resta sobre, l’ancienne animatrice déclama et fit des photos, la Présidente réussit à être aussi rebelle que d’habitude, n’aimant pas la mer et avouant sa peur de l’abîme, Ch de P conta une histoire d’amour et d’entrailles, Aster raconta la pêche à pied quand la mer se retire en Normandie, et en dernier Blouk lut quelques phrases décousues dont il était médiocrement satisfait.

Le meilleur était à venir autour d’une table richement servie, avec des gobelets de plastique certes, mais emplis de champagne pour fêter deux anniversaires, puis de vins fins et de liqueurs capiteuses et les flashes crépitèrent longtemps pour garder de cette soirée réussie un souvenir inoubliable.