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Scandale du Sacre

7 Mai 2013 , Rédigé par Blouk Publié dans #Musique

Nous avons du mal maintenant à comprendre ce qui a pu faire scandale dans le « Sacre du Printemps ». André Boucourechliev écrit que le compositeur a eu la première idée de ce ballet en 1910 à Saint-Petersbourg alors qu’il travaillait encore à « L’Oiseau de Feu ». Il parla aussitôt de sa « vision » à son ami Nicolas Roerich, peintre et archéologue, spécialiste du paganisme russe.

En 1911 l’argument du « Sacre » est élaboré, le compositeur travaille à la musique jusqu’en mars 1913. Les répétitions ont commencé fin 1912 et se poursuivent au gré des déplacements de la troupe des Ballets russes, successivement à Berlin, Vienne, Londres, Monte Carlo. La première répétition à Paris au Théâtre des Champs-Elysées a lieu le 18 mai 1913. Puis deux répétitions avec l’orchestre sous la direction du chef Pierre Monteux les 26 et 27 mai. Le 28 mai est la date de la Générale en présence de peintres, d’hommes de Lettres, des compositeurs Debussy et Ravel, et de la presse parisienne, elle se déroule dans le calme, rien ne laisse présager l’orage à venir.

Le lendemain Serge de Diaghilev avait jugé bon de faire placer quelques jeunes gens dans les loges, chargés d’applaudir et de manifester leur satisfaction : ceux-ci, qui avaient certainement été payés, s’acquittèrent mécaniquement de leur tâche mais les abonnés habituels, surpris par les gestes des danseurs, notamment par leur façon de tenir leurs pieds en dedans, se mirent à rire et à siffler, un spectateur réclama « Un docteur ! Non, un dentiste ! » en voyant la mine tremblotante d’une des danseuses, et donc le tumulte devint rapidement général, les sifflets augmentant malgré les applaudissements nourris. Ce que voyant, et espérant faire revenir le calme, Diaghilev fit mettre la salle dans le noir complet avant de faire rallumer toutes les lumières.

Dès le début du tohu-bohu, Stravinsky était passé en coulisses où Nijinsky debout sur une chaise, s’évertuait à hurler vers ses danseurs qui, entre le bruit de leurs pas, les cris de la salle et l’éclat des trompettes, n’entendaient rien de toutes façons. Le compositeur dut même retenir Nijinsky par le pan de sa veste pour l’empêcher d’aller sur scène exprimer violemment son indignation.

Stravinsky écrit dans « Chroniques de ma vie » : « … ces manifestations, d’abord isolées, devinrent bientôt générales et, provoquant d’autres part des contre-manifestations, se transformèrent très vite en un vacarme épouvantable ».

Le scandale n’empêcha pas le compositeur d’aller dîner ce soir là dans un grand restaurant en compagnie de Diaghilev, Proust, Jean Cocteau et Nijinsky sous prétexte de réconforter ce dernier. Puis vers deux heures du matin, les trois russes et Cocteau se retrouvèrent au bois de Boulogne pour une balade en fiacre qui tient sans doute de la légende.

 (Source : biographie de Stravinsky – A. Boucourechliev – Fayard)

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