A LA RECHERCHE DU VOYAGE PERDU

Il y aurait des ruines, comme à Athènes, Syracuse ou Rome ; des colonnes brisées, un temple dorique préservé.

Il y aurait les mosaïques de la Casa Reale d’Armerina et celles de Loupian, les fresques de Pompéi et d’une petite église audoise.

Il y aurait une vallée d’oliviers au fond de laquelle se révèlerait Delphes, une île d’où l’on pourrait, tous les matins, lire l’humeur du volcan, un promontoire pour découvrir le port enroulé dans les rochers.

Il y aurait aussi des ruelles encombrées et bruyantes, des couvents fermés au monde, des châteaux et des palais peuplés d’ombres, des églises élevées dans l’ardeur religieuse d’un temps écoulé, des théâtres et des opéras aux frontons fastueux.

Il y aurait des ponts baptisés de noms de rois, des avenues célèbres peut-être défigurées, des tours aux noms de saints oubliés, des stations de métro aux entrées dissimulées ou exposées, des hôtels rénovés ignorant les clients remarquables qui ont fait leur réputation.

Pour atteindre le but du voyage perdu, il faudrait courir l’Europe de Prague à Vienne, de Londres à Naples, adopter les moyens de transport les plus divers mais surtout délaisser l’avion, lire les récits de voyage de George Sand, de Paul Morand, de Byron et de Chateaubriand.

Il faudrait rassembler les images entrevues, les mots retenus, entendre les accents de la vieille Europe et ceux du sud de la Méditerranée, goûter les pâtisseries des grands-mères, serrer dans ses bras la poupée offerte par une petite fille andalouse.

Ainsi peut-être le voyage perdu serait-il retrouvé.